Un Code de Bonnes Pratiques de la Profession – RelationClientmag.fr

Remplacer le dispositif Bloctel par un dispositif opt-in nuirait à l’emploi sans parvenir à mettre un terme aux ping calls et appels d’automates, avertit le président du SP2C. Patrick Dubreil croit davantage en un code de bonnes pratiques, fondé sur le respect du consommateur.

Qu’en est-il de la nouvelle loi sur le démarchage téléphonique débattue à l’Assemblée?

Une confusion se crée entre la nouvelle loi sur le démarchage téléphonique et l’amendement lié à la délocalisation des centres d’appels. De nombreux échanges ont été réalisés à notre initiative auprès du gouvernement, dans le cadre d’un collectif comprenant l’AFRC, le SNCD, la FVD, la Fevad, le Sist, le SP2C et le Syndigel. Ces organisations sont toutes affectées dans leur activité de commerce ou d’emploi par ce projet.

Quel bilan peut-on faire du dispositif Bloctel pour l’heure?

Bloctel est une évolution du dispositif Pacitel. Je ne suis pas en capacité de fournir un bilan chiffré complet mais il s’agit d’un dispositif qui fonctionne. En effet, depuis sa création, 4 milliards de numéros de téléphone ont été repoussés. Les équipes dédiées à Bloctel ont étudié l’ensemble des plaintes reçues: 40% des plaintes relèvent de ping calls (appels automatisés renvoyant sur des serveurs vocaux surtaxés), ce procédé constitue une escroquerie. 20% sont le fait d’automates délivrant des messages, dont la régulation relève de la Cnil.

Les consommateurs attendent beaucoup de Bloctel. Ils sont dérangés par nombre d’appels qui n’ont pas de rapport direct avec la protection de Bloctel. Les 40% de sollicitations restantes peuvent venir de structures qui ne s’imposent pas les mêmes obligations éthiques que les adhérents du SP2C. Les pratiques abusives ne seront pas résolues en pratiquant l’opt-in car elles relèvent de l’escroquerie. À nous de rappeler les bonnes pratiques et les règles imposées par Bloctel, nos donneurs d’ordres, le RGPD, la Cnil. Nous avons péché par manque de communication à cet égard, c’est pourquoi nous promouvons un code de bonne conduite qui engage les prestataires vertueux. Cela sera apporté comme une garantie auprès du Centre national de la consommation (CNC).

La proposition initiale proposait de passer d’un système d’opt-out à un système d’opt-in. L’opt in a déjà été adopté en Allemagne (consentement préalable du consommateur à tout démarchage), qu’en pensez-vous ? Pourquoi une telle mesure est-elle inapplicable en France?

Tous les jours, l’ensemble des professionnels de France, artisanat compris, réalise plus d’appels sortants que le SP2C. Les appels sortants (téléprospection) sont une partie du commerce moderne, lequel serait fortement affecté. En ce qui concerne le SP2C, nous représentons 32000 salariés en France, dont 85% sont situés dans les territoires, dans des bassins d’emploi sur lesquels nous avons un rôle vital. Dans certaines zones, aucun autre employeur n’est en mesure d’embaucher ces personnes. Nous estimons à 20% de nos effectifs le nombre de personnes dédié aux appels sortants. Cependant, ces activités sont souvent mutualisées avec des appels entrants, la proportion d’effectifs affectés s’élèverait donc à environ un tiers.

Certains députés font valoir qu’une partie des appels sortants sont réalisés à l’offshore. Le SP2C emploie en effet 42000 personnes à l’offshore, mais nous calculons bien l’impact sur les salariés situés en France.

Des associations de consommateurs telles que Que Choisir indiquent qu’alors que la proposition de loi sur le démarchage téléphonique était sur le point d’être discutée à l’Assemblée nationale, le gouvernement a déposé une série d’amendements, portant notamment sur la mise en place d’un indicatif téléphonique pour tous les démarcheurs et la réduction des sanctions proposées. Quels sont les points d’achoppement?

Le premier point pose une problématique technique. En effet, depuis la loi Hamon sur la consommation, les entreprises émettant des appels sortants sont dans l’obligation de produire des numéros en clair, lesquels doivent pouvoir être joints en retour par le consommateur. Or, le dispositif visant à introduire un indicatif de télémarketing vient contrarier ces deux principes.

Par ailleurs, l’adjonction d’un indicatif lié au télémarketing ferait assez brutalement chuter les taux de contact.

Concernant les sanctions, c’est la DGCCRF qui fait office de police. Le SP2C considère que les pratiques abusives ne sont pas assez sanctionnées. En effet, l’application des amendes est insuffisante.

Comment valoriser les entreprises respectueuses des bonnes pratiques?

Les adhérents du SP2C ont travaillé cet été à la mise à plat du code de bonnes pratiques. Ce dernier doit être visé par notre conseil d’administration, puis je le présenterai aux autres présidents des syndicats et fédérations du secteur avant mon audition auprès du CNC.

Les grandes orientations concerneront notamment les horaires d’appel, la fréquence des appels, la clarté de l’objet de l’appel (impossibilité d’introduire un appel commercial sous la forme d’un sondage). De plus, nous investissons beaucoup sur le suivi de nos sollicitations : lorsqu’un consommateur se dit dérangé par un appel, nous lui expliquons la marche à suivre pour s’inscrire sur Bloctel.

Rappel du contexte par le SP2C

– L’Assemblée nationale a examiné en séance publique le 21 juin 2018, en première lecture, une proposition de loi visant à renforcer les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique.
– Les échanges auxquels a donné lieu cet examen ont largement confirmé la perception d’un comportement intrusif et attentatoire au respect de la vie privée, particulièrement préoccupant pour les personnes fragiles. La plupart des interventions ont déploré dans ce contexte le manque d’efficacité du dispositif Bloctel mis en place depuis le 1er juin 2016. Mais ce dispositif, s’il a permis de faire baisser le nombre de sollicitations téléphoniques indésirables, ne répond pas aux attentes d’un grand nombre de consommateurs.
– L’orientation initialement envisagée par la proposition de loi, à savoir l’exigence d’un accord exprès préalable des détenteurs d’un abonnement téléphonique pour toute inscription sur une liste de clients pouvant être démarchés par les entreprises (opt-in), n’a pas été retenue lors du vote du 21 juin dernier. Plusieurs intervenants ainsi que le gouvernement ont exprimé des interrogations quant au fait que cette solution serait plus efficace que Bloctel afin de lutter contre le démarchage intempestif compte tenu de sa nature fréquemment frauduleuse.
– À l’occasion des débats du 21 juin dernier, Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, a fait part à l’Assemblée nationale de la volonté du gouvernement de mieux lutter contre les pratiques abusives de démarchage téléphonique. Toutefois, face à la complexité du sujet – tant en termes techniques qu’en termes d’impacts sur les comportements et l’emploi – , la Ministre a souligné la nécessité de garantir le meilleur niveau de protection possible à nos concitoyens tout en s’assurant de la robustesse des solutions législatives et techniques proposées.
– Delphine Gény-Stephann a ainsi indiqué que le gouvernement estimait nécessaire que les initiatives qui pourraient être prises fassent l’objet d’une concertation avec les associations de consommateurs, les représentants du monde économique et les parlementaires. Elle a souhaité que cette concertation soit rapidement engagée au sein du Conseil national de la consommation.
– Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, a présidé le lundi 23 juillet la réunion de lancement des travaux du Conseil national de la consommation (CNC) sur le thème de la lutte contre les pratiques abusives de démarchage téléphonique, associant des parlementaires.
– Delphine Gény-Stephann fait de la lutte contre les sollicitations téléphoniques indésirables une priorité d’action de la DGCCRF. Le lancement de ces travaux du CNC est la concrétisation de son engagement pris lors de l’examen par l’Assemblée nationale le 21 juin 2018 de la proposition de loi visant à renforcer les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique.
“Face à la complexité de ce sujet en termes techniques et d’impact sur les comportements et l’emploi, il était indispensable d’associer l’ensemble des acteurs concernés à la préparation de solutions robustes”, selon Delphine Gény-Stephann. Au cours de ses travaux, le CNC devra:
-établir un diagnostic global, d’une part, sur les situations auxquelles sont confrontés les consommateurs et, d’autre part, sur l’importance du secteur du démarchage téléphonique, notamment en termes d’emploi;
-dresser un état des lieux des dispositifs en vigueur dans les principaux États membres de l’Union européenne;
-identifier les limites des outils de régulation existants et proposer les mesures qui pourraient les rendre plus efficaces dans la lutte contre les sollicitations téléphoniques illicites et frauduleuses.
– La réunion de lancement du lundi 23 juillet était l’occasion d’un premier échange entre les rapporteurs du groupe de travail du CNC, [notamment les représentants d’UFC-Que Choisir, du secteur des assurances (…) ] et plusieurs députés (de la majorité et de l’opposition) qui ont directement participé aux débats sur la proposition de loi. Les travaux du CNC donneront lieu à plusieurs réunions mensuelles thématiques et devront s’achever au plus tard le 1er janvier 2019.